BIEN-ETRE
Alimentation des personnes âgées : bien manger pour mieux vieillir
Quel est l’impact du vieillissement sur notre alimentation ?
Agathe Reynaud Simon : Quand on vieillit, sans pathologie associée, on mange généralement moins et c’est normal. Ce qui n’est en revanche pas normal, c’est de perdre du poids. La perte de poids perçue comme naturelle chez les personnes âgées est en effet une idée reçue. Entre l’âge de 20 ans et de 65-70 ans, il est plutôt normal de prendre 12 à 15 kilos supplémentaires. Avec l’avancée en âge, les besoins sont aussi différents, notamment en termes de protéines. Chez un adulte jeune, le besoin en protéines est de 0,8 gramme par kilo et par jour. Pour les personnes âgées, il est de 1 à 1,2 grammes. Ce qui veut dire qu’elles peuvent, comme au moment de l’adolescence, manger de la viande, du poisson ou des œufs à chaque repas. Les personnes âgées perçoivent aussi moins le goût des aliments, notamment ce qui est salé et ont parfois tendance à se tourner vers des aliments sucrés.
En quoi l’alimentation est-elle essentielle pour bien vieillir ?
L’alimentation est importante car le principal danger d’une mauvaise alimentation pour les personnes âgées est de s’affaiblir physiquement. On le voit chez des personnes qui ont du mal à marcher, à monter les escaliers, à porter des paquets. Un affaiblissement dû à la baisse de la masse musculaire. Le problème, c’est qu’en perdant trop de poids, certaines personnes peuvent souffrir de dénutrition. Et quand on est plus faible, on risque des grippes ou des cas de Covid plus graves, des infections nosocomiales plus fréquentes à l’hôpital, etc. La dénutrition aggrave aussi les symptômes des pathologies liées à l’âge, entraîne des risques de chutes plus importants et une perte d’autonomie plus précoce.
Que doivent alors manger les personnes âgées pour rester en bonne santé ?
Comme les personnes âgées mangent généralement moins, l’alimentation doit être plus riche et plus équilibrée pour compenser cette perte en quantité. C’est à dire une alimentation riche en protéines, en laitages pour le calcium, en fruits et légumes. Il faut aussi prendre des suppléments en vitamines D pour éviter une carence et des dégâts possibles sur les os et les muscles. Il faut insister sur l’apport en protéines (viande, œuf ou poisson à chaque repas), en fruits et légumes, en féculents et en laitage (3 ou 4 par jour). Les aidants familiaux peuvent aussi inciter leurs proches âgés à ne pas se restreindre non plus, en sel, en sucre, en gras et à manger ce qui leur fait plaisir. Un message pas toujours simple à faire passer, notamment auprès des personnes qui se sont restreintes toutes leur vie pour rester minces !
Comment gérer la perte d’appétit ou de poids d’un proche âgé ?
La première chose à faire pour un proche aidant est de surveiller que la personne aidée garde un poids stable, se pèse au moins une fois par mois et n’hésite pas à consulter en cas de baisse de poids anormale. L’aidant familial peut voir si son parent flotte dans ses vêtements, semble sauter des repas, laisse davantage de restes dans son assiette. Un frigo peu rempli ou avec des aliments périmés est aussi le signe d’un désintérêt pour l’alimentation. Une perte de poids peut être le signe d’un problème de santé. Cela peut être aussi une accumulation de plusieurs petites choses. Les personnes âgées se mobilisent moins, elles peuvent rencontrer des problèmes bucco-dentaires avoir de ce fait moins de plaisir à s’alimenter, des douleurs, se sentir déprimées, etc. Ces petits et grands soucis du quotidien entraînent aussi une baisse d’appétit.
Les personnes âgées perdent en partie la sensation de soif et de faim, elles régulent moins leur appétit spontanément, d’où l’intérêt de maintenir si possible un rythme alimentaire avec des repas structurés. Il est aussi important de ne pas rester à jeun plus de 12 heures pour éviter au corps de maintenir l’activité en allant puiser dans les muscles pour nourrir l’activité du cerveau, des reins, etc. Cela signifie par exemple de ne pas dîner très tôt et petit déjeuner ou déjeuner tard le lendemain.
Quels conseils donneriez-vous aux aidants pour aider leurs proches à retrouver le goût de bien manger ?
On peut inciter son parent âgé à manger des protéines chaque jour en allant faire son marché, en l’aidant lors de la préparation des repas, en l’invitant à un repas de famille. Pour les personnes âgées vivent seules, il existe des restaurants collectifs dans les mairies, des clubs du troisième âge qui proposent des activités cuisine, des ateliers culinaires pour prendre plaisir à cuisiner et à manger avec d’autres personnes. Si la personne âgée n’a plus la possibilité ou l’envie de se faire à manger, il y a la solution du portage des repas. À condition que les plats soient terminés et pas mangés en plusieurs fois. Les aidants peuvent aussi accompagner leur proche âgé pour faire des courses (un bon moyen de remplir le frigo de bonnes choses). Il ne faut pas hésiter à consulter un diététicien qui va pouvoir faire une évaluation nutritionnelle de la personne âgée et proposer un suivi en lien avec son état de santé, ses habitudes et ses envies. Enfin, pour rester en forme et entretenir ses muscles, il est indispensable de pratiquer une activité physique adaptée. ».
Agathe Reynaud Simon est cheffe du service de gériatrie de l'hôpital Bichat à Paris et membre du comité de rédaction du Guide nutrition pour les aidants de personnes âgées publié en 2019 par Santé publique France.
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